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MERCREDI
21 DÉCEMBRE 2016
Quand Edhem Sljivo a débarqué à
Liège en 1978, il ne pensait jamais
y trouver sa seconde maison. «
Les
joueurs yougoslaves ne pouvaient
quitter le pays avant l’âge de 28
ans
», narre-t-il. «
Je pensais être là
pour 3 ans… et en fin de compte,
j’ai passé plus d’années ici qu’à Sa-
rajevo !
» Même si le championnat
de Belgique avait plus d’allure
dans les années 70, voir un joueur
de la trempe d’Edhem Sljivo dé-
barquer au RFC Liège tenait du
miracle. «
Je cherchais par-dessus
tout à monnayer mon talent pour
faire vivre ma famille. Avant Liège,
j’avais eu des contacts avec Mar-
seille, Braunschweig, Bordeaux…
Via le manager Ljubo Barin, j’avais
trouvé un accord avec le…Standard
alors entraîné par Robert Waseige.
Il fallait juste attendre le retour de
Roger Petit en voyage d’affaires à
l’étranger.
» Puis, le manager Jerko
Martinic (qui est resté l’agent
d’Edhem et a amené plus tard
Varga, Stojic, Malbasa, Milosevic)
est entré dans la danse avec Jean
Loos. «
Le Standard avait connu des
joueurs yougoslaves plus illustres
comme Galic, Takac, Bukal mais j’ai
signé à Liège parce qu’il était temps
de partir.
»
PRESQUE AU PSG
Pendant trois ans, Liège a connu
des hauts et des bas. «
Après un an
à peine, on m’avait quand même
élu 3e meilleur joueur du cham-
pionnat derrière Ceulemans et Ol-
sen !
», se souvient-il. «
Je n’oublie-
rai jamais une victoire 4-1 contre le
grand Anderlecht de Haan, de Bree,
Rensenbrink, Dusbaba, etc... avec
un doublé de Quaranta, un but de
Susic… et un de moi.
»
En 81, Edhem repart à l’aventure.
«
J’avais 31 ans, je voulais gagner
plus. J’ai failli signer au PSG. J’ai
rencontré le président Borrelli…
mais je lui ai dit que j’allais aussi
écouter une proposition de Nice.
Vlatko Markovic m’y voulait pour
construire une grande équipe. L’at-
trait de la Côte d’Azur, je suis parti à
Nice. L’OGC est descendu en fin de
saison et Markovic a été viré en
cours de saison… mais j’ai quand
même disputé le Mundial 82.
»
Martinic le recase à Cologne, alors
entraîné par le mythique Néerlan-
dais Rinus Michels. «
Takac, qui
avait été mon coach à Liège, était
son adjoint. On a gagné la Coupe en
83 même si je n’ai pas disputé la fi-
nale à cause d’une blessure. Durant
tout le temps où je jouais là-bas,
j’habitais à nouveau à Liège.
»
Michels viré, Sljivo glisse sur le
banc et l’heure d’un retour à Liège
sonne en octobre 83. «
Robert Wa-
seige était l’entraîneur : c’était le
destin d’être enfin réuni. Liège était
au plus mal avec deux points au
classement. J’ai assisté à un derby
gagné contre le Standard puis j’ai
joué la semaine suivante au RWDM
(NDLR : victoire 1-2). »
FOOTBALL - MAGAZINE
D
es joueurs capables de
transcender les cli-
vages traditionnels
entre clubs ne courent
pas les rues. Edhem Sljivo est
de cette trempe. Rouge, mauve,
bleu, etc... tout le monde s’est
émerveillé devant son talent et a
apprécié l’homme. 30 ans après
son accident, Edhem Sljivo a
toujours le regard pétillant.
« Liège, c’est
ma ville »
Après avoir assuré le maintien en
83-84, le plus beau était à venir
avec une 3e place en 84-85. «
J’ai
apprécié mes deux époques à Liège.
En 84-85, j’ai vite compris qu’on al-
lait se qualifier pour l’UEFA. On
avait une belle équipe avec Thans,
Geurts, François, Ernes, de Sart,
Quaranta… et tous les autres. Des
matches mémorables ? Bien sûr la
qualification dans l’antre d’Inns-
brück avec Hansi Müller ou une
qualification en Coupe. Anderlecht
avait gagné 0-1 à Rocourt, on gagne
0-1 au retour puis on se qualifie aux
tirs au but. Ah que de belles soirées,
carnaval et autres… J’ai toujours
des vidéos de l’époque…
»
PELÉ ET MARADONA
De sa carrière, il retient aussi deux
grandes rencontres. «
En tournée
pour 40 jours en Colombie avec le
FK Sarajevo, j’ai croisé Pelé égale-
ment de passage avec Santos. On a
fait une belle photo au bord de la
piscine.
»
Plus tard, c’était au tour de Diego
Maradona. «
Avec Cologne, nous
avions été invités au tournoi Joan
Gamper à Barcelone. J’ai affronté
Maradona qui disputait alors son
premier match après sa blessure
face à Goikoetxea… que j’ai affron-
té plus tard avec Liège lors de la
double confrontation face à Bil-
bao ! »
Cette superbe carrière s’est
figée il y a 30 ans. «
J’ai disputé
plus de 800 matches dans ma car-
rière, sans jamais une grave bles-
sure avant l’accident. C’est comme
ça. Alors, être élu meilleur joueur
étranger de l’histoire du FC Liège,
oui c’est une fierté. Je suis ici chez
moi. Liège, c’est ma ville.
»
-
UN REPORTAGE DE PHILIPPE GERDAY
Edhem Sljivo nous ouvre le livre de ses souvenirs
Trois clichés de la carrière d’Edhem Sljivo et
trois moments clés : jouer pour son pays (qui
s’appelait encore alors la Yougoslavie), sauver
Liège en mauvaise posture sportive lors de son
retour en 83 (« Je n’irai pas jusqu’à dire que
c’est grâce à moi », dit-il modestement) et puis
conduire les « Sang et Marine » vers la coupe
UEFA.
© SN et Repro Van Ass
Retiré du monde de l’horeca (il
a remis le café « Le 8 » qu’il gé-
rait avec sa femme fin 2014),
Edhem Sljivo continue à vivre
sa passion du foot. On l’aper-
çoit régulièrement dans une
agence de paris sportifs en
compagnie de ses amis, non
loin de son nouveau domicile.
À presque 67 ans (il les aura le
16 mars prochain), il continue
à sourire à la vie entouré de sa
famille. Même le 30e anniver-
saire de son tragique accident
ne le chagrine pas trop. «
J’es-
saye de ne pas trop y penser mais
c’était le destin. Je ne me plains
pas,
je suis toujours en vie,
d’autres comme Ludo Coeck ou
François Sterchele n’ont pas eu
cette chance.
»
Sa carrière s’est abruptement
terminée le 17 décembre 1986.
«
J’avais été appelé à l’Hotel Ra-
mada
(NDLR : l’actuel Penta Ho-
tel)
pour servir d’interprète alors
que Liège négociait avec un
joueur yougoslave
(NDLR : Mira-
lem Zjajo… qui n’a finalement
jamais signé au RFCL).
Zvonko
Varga était là. Je n’ai pas vrai-
ment de souvenir. Je me rappelle
qu’il pleuvait ce soir-là. Je ne rou-
lais pas vite, j’ai voulu dépasser
un camion… Je me suis réveillé
paralysé à l’hôpital. Je suis resté
9 mois à l’Espérance à Monte-
gnée.
»
Les visites n’ont pas cessé du-
rant cette longue hospitalisa-
tion. «
Robert Waseige est venu
souvent me voir. Je me rappelle
qu’il y avait plus de 80 personnes
pour mon anniversaire. Le per-
sonnel devenait fou
(rires). »
THANS ET LE CHALLENGE
Quelques mois après son acci-
dent, un match de gala avait
été organisé à Rocourt en son
honneur (son frère Mehmed,
ex-footballeur à Seraing avec
Rojas et Oblitas, avait joué avec
la vareuse « Sang et Marine »)
mais le plus bel hommage était
encore à venir. «
J’ai été contacté
par Alain Darcis qui voulait re-
lancer un tournoi futsal au Sart
Tilman. On a commencé par 30
équipes et, 26 ans plus tard, le
Challenge Sljivo existe toujours.
Après le Sart-Tilman, il y a eu Co-
ronmeuse et maintenant Marche.
Autrefois, Benoît Thans et moi-
même étions associés sur le ter-
rain et voilà que nous sommes
ensemble
à nouveau depuis
quelques années. Voir tous les
jeunes, discuter avec des parents,
voilà qui contribue à maintenir
mon moral… même si je l’ai tou-
jours conservé durant ces an-
nées. Oui, j’ai été paralysé mais
j’estime tout de même avoir pas
mal
récupéré
grâce
aux
soins.
»
-
« Je suis en vie, je n’ai pas à me plaindre »
Le grave accident du 17 décembre 1986 a brutalement stoppé sa carrière
Avec Jean-Pierre Delmotte.
© TVA
Sous la vareuse du FC Liège,
Edhem Sljivo a disputé 193
matches et inscrit 43 buts. Son
tout 1er match et son tout 1er but
en Rouge et Bleu, c’était à la
Chaussée de Tongres, le 30 août
78, contre Winterslag. Lors de son
ultime saison (86-87), le Bosnien a
marqué son dernier but en D1
belge au stade Vélodrome (victoire
4-1 et le but de 2-1 contre Ware-
gem le 19 octobre 1986) et joué
les 90 minutes de son dernier
match le 14 décembre 86 contre
Berchem (victoire 3-0). «
Même si
Liège était à l’époque un club
moyen par rapport à Bruges ou
Anderlecht, Miljanic me voulait en
équipe nationale »
, se souvient
« Edko ». «
Je n’ai que 12 sélections
mais un joueur de mon talent
aurait dû en avoir plus de 70. En
82, les journalistes ont dit que
j’avais été le meilleur de la prépara-
tion et le meilleur Yougoslave du
tournoi. J’étais déjà dans la présé-
lection pour le Mondial 74 tout
comme Bukal du Standard. À la
dernière minute, lui et moi avons
sauté du noyau. En qualification
pour le Mundial 82, Miljanic m’a
appelé pour un match contre la
Grèce à Split. Liège ne voulait pas
me libérer…mais j’y suis allé. J’y ai
inscrit le plus beau but de ma
carrière. Il a été repris par Téléfoot,
qui a cité le nom de Liège. Du coup,
Jules George a annulé l’amende
50.000 FB qu’il m’avait infligée !
»
Son stade fétiche n’existe plus
malheureusement. «
Quand je vois
Kinépolis à la place… Je suis heu-
reux de voir que Liège a retrouvé
une place à Rocourt. On me de-
mande souvent pourquoi je ne suis
pas encore venu, Willy Robin m’en
parle régulièrement. C’est promis :
j’assisterai à un match cette sai-
son.
» Au passage, glissons une
petite proposition aux dirigeants
liégeois : quand le nouveau stade
sera construit, pourquoi ne pas
baptiser une des tribunes du nom
de son ancien numéro 8 ?
-
Pourquoi pas une tribune à son nom dans le futur stade ?
« Je viendrai voir un match à Rocourt cette saison »
Les formations de Verviers et
de Malmedy ont trop souvent
été les exceptions régionales
en matière de handball. La
donne pourrait très bientôt
changer si l’on en croit Patrick
Garcia : «
Il s’agira, en effet, de
notre grand projet 2017 au ni-
veau de l’aile francophone de la
fédération. Nous avons effective-
ment l’intention d’augmenter
fortement les lieux où l’on pour-
ra s’adonner au « jeu à sept ». Et
c’est plutôt bien parti en ce qui
concerne la région verviétoise.
»
Le secrétaire général de la fédé
entre dès lors dans le détail :
«
Nous sommes sur le point de
finaliser une démarche consis-
tant à créer trois centres de
handball de proximité. À savoir,
à Pepinster (très demandeur en
la matière), à Spa et à Sou-
magne. Nous avons également
eu des contacts avancés avec les
autorités de Herve. Le dossier
est, pour l’heure, en « stand-by »,
mais je ne désespère pas de re-
lancer
les négociations.
» Et
d’expliciter la chronologie de
la manœuvre : «
Nous
tra-
vaillons en étroite collaboration
avec les directeurs des centres
sportifs des localités en ques-
tion. Ceux-ci contactent les diffé-
rentes écoles de l’entité et pro-
posent une initiation au hand.
Grâce à l’appui de l’Adeps, nous
envoyons alors un de nos moni-
teurs diplômés qui distillent les
rudiments de notre sport aux
élèves
intéressés. Ensuite,
il
s’agit de prendre en compte les
disponibilités des diverses salles
en vue des entraînements. Le
but du jeu est bien évidemment
de créer des clubs dans ces com-
munes-là. Je dois aussi ajouter
que la demande est très forte,
aussi, en provinces de Namur et
du Luxembourg.
»
L’occasion de faire mieux
connaissance avec notre inter-
locuteur : «
En 81, j’ai été déta-
ché par l’armée pour intégrer le
staff d’organisation du Mondial
C qui se disputait à Coron-
meuse. Il faut croire que je ne
m’en suis pas trop mal sorti car
j’ai été engagé par la fédération
dès la fin de mon service mili-
taire.
» Peu après, l’Angleurois
débarquait sur le Plateau : «
Je
réside ainsi avec ma petite fa-
mille à Charneux depuis 1988.
Auparavant, j’ai longtemps pra-
tiqué
le
basket.
À
titre
d’exemple, j’ai commencé au
Mosa avant de transiter par le
Forum et de terminer ma mo-
deste carrière à Aubel dont je ne
garde pas un souvenir impéris-
sable…
» Sûr qu’avec les pro-
jets mis en place à Spa, Sou-
magne et Pepinster, on reverra
souvent le SG fédéral sous nos
latitudes dans les mois à venir.
Toujours un bonheur de le
rencontrer.
-
MICHEL CHRISTIANE
Du Hand à Spa, Pepinster et Soumagne
HANDBALL
Lundi, Patrick Garcia procédait
au tirage de la Coupe.
© DR